Jadis n° 123

  JADIS  123 – Mai 2017

Editorial

Dans notre numéro de printemps, nous sommes très heureux de publier un important travail de recherche de M. André Dromard, retraçant la vie d’une grande dame du Cambrésis originaire de Cauroir, Madame Yvonne Pagniez.

Au fil de la reconstitution de son itinéraire, nous découvrons la résistante, la journaliste, l’écrivain, la féministe. Une vie consacrée à la défense de la patrie et à l’attention aux autres, qu’il est précieux de connaître, au moment où l’école de Cauroir va prendre le nom d’école Yvonne Pagniez.

M. Gérard Leducq avait, dans Jadis en Cambrésis n° 113, effectué une recherche inédite sur un autre écrivain du Cambrésis, à présent injustement oublié, Fernand Leprette. Les ha­sards de l’existence, les rencontres, ont amené ce Saint-Hilairois à enseigner le français en Egypte, où il a animé toute la vie culturelle entre les deux guerres.

M. Gérard Leducq nous présente cette fois un extrait d’un roman inédit et inachevé de Fer­nand Leprette, L’Homme de Kéna, texte autobiographique, où l’écrivain évoque de manière remarquable le travail des mulquiniers, tisseurs en cave, à Saint-Hilaire au début du XXC siècle.

Un petit saut dans le temps pour nous retrouver à Cambrai au Moyen Age sous la plume de M. Gérard ()omise : sous la forme du feuilleton, nous avons tous les détails de la visite du grand artiste Jan Van Eyk, venu peindre un cierge pascal à la demande de l’évêque. Nous côtoyons bien sûr d’autres personnages connus, comme le musicien Guillaume du Fay…

Enfin M. Michel Leduc nous emmène à Solesmes, à la découverte des très nombreux so­briquets et surnoms des habitants, qui permettent de distinguer des familles, de pointer des caractéristiques physiques ou morales, le tout agrémenté de nombreuses anecdotes.

Nous vous souhaitons de très agréables découvertes au fil de ce numéro.

Toute reproduction, même partielle, d’articles parus dans « Jadis en Cambrésis » (texte et/ou photos), sous quelque support que ce soit, est strictement interdite sans l’autorisation de l’auteur et de l’éditeur.

Sommaire

2017 123 05 Couverture 1 : Yvonne Pagniez

2017 123 05 Couverture 2 : Sommaire – Coordonnées

2017 123 05 01 page 01  Éditorial.

2017 123 05 02 page 02  Cauroir : Une figure de la Résistance : Yvonne Pagniez André Dromard.

2017 123 05 03 page 31  Jan Van Eyk à Cambrai (2ème partie) Gérard Domise.

2017 123 05 04 page 37  Souvenirs d’une enfance à St-Hilaire (roman de Fernand Le­prette) Gérard Leducq.

2017 123 05 05 page 44  Sobriquets et surnoms de Solesmes Michel Leduc.

Page 48 : Bon d’abonnement

2017 123 05 Couverture page 3 : Ouvrages de l’association

2017 123 05 Couverture page 4 : Dédicace d’un livre de contes offert par Yves Pagniez à sa grand-mère

Il y a trente-cinq ans, disparaissait une grande dame

Une figure de la Résistance… Yvonne Pagniez

André Dromard

Le Cambrésis a l’honneur d’y avoir vu naître une grande dame, figure incontestable de notre histoire… Résistante, écrivain, journaliste-reporter, sociologue, féministe mili­tante… et aussi philosophe.

Cauroir, son village natal : Issue de fa­milles honorablement connues dans le monde industriel cambrésien, les Pagniez-Risbourg, le 10 août 1896, Yvonne naît au Château du Petit Cauroir, domicile de ses grands-parents paternels. Elle est la fille de Mar­guerite Risbourg et d’Auguste Pagniez. Ce dernier est déclaré en tant que propriétaire sur le registre d’état-civil de Cauroir. Quant au grand-père maternel, Théophile Risbourg, il est connu en tant que « fabriquant de sucre ».

Les Pagniez dans le Cambrésis : Famille influente de l’aristocratie cambrésienne, selon certains généalogistes elle serait con­nue depuis le XVe siècle. Le patronyme va connaître différentes formes : Pané, Panié, Panier et enfin Pagniez à partir de 1686.

A partir de cette époque, nous les retrou­vons, notamment dans le domaine juridique (avocats, notaires…) ou dans celui de l’agro‑alimentaire (chicorée, sucrerie, brasserie…).

Les sucreries de Caudry, Esnes étaient dirigées par la famille Pagniez. L’un des ancêtres le plus connu, un certain Pierre Marie Pagniez va épouser Rosalie Oudart dont le père était brasseur. Le couple va demeurer à l’Hôtel Saint Pol de Cambrai. Son fils Cyril, veuf sans en­fant, était, en 1811, le dernier porteur du patronyme Pagniez. Remarié avec une riche héri­tière de la famille Leleu de Douai, ils auront 11 enfants dont le grand-père d’Yvonne Pagniez.

Les Risbourg de l’Ostrevent : Les Risbourg, originaires de la région de Bouchain étaient également des sucriers très implantés dans la région. Après avoir dirigé la sucrerie de Noyelles-sur-Escaut, Théophile Risbourg va acquérir la sucrerie de Cauroir auprès de Victor…

Jan Van Eyk à Cambrai – 2ème  partie : Hospitalité cambrésienne

Gérard Domise-Pagnen

La préparation du souper : Cependant dame Guillemette s’agitait et, comme on dit encore en Cambrésis, mettait tout à place pour recevoir l’hôte de son fils. Elle allait et venait, de la cuisine à la salle, allumait ses lampes, stimulait Aldegonde et Gillonne, et, voyant que l’heure de la fermeture des portes approchait, commençait à s’inquiéter grandement. Aussi fut-elle bien aise d’entendre frapper à la porte. C’était Simon Breton :

Madame, dit-il, maître Van Eyk est arrivé, mais il est d’abord entré à l’auberge de «/Image Notre-Dame » pour s’y habiller convenablement, ne voulant pas se présenter à vous couvert de la poussière du voyage. Il laissera son valet et ses chevaux à l’auberge, et, sur les instances de Guillaume, viendra loger céans. Votre fils vous prie d’avoir patience encore une petite demi-heure.

– Maître Van Eyk est un homme bien appris, fit Guillemette.

Et elle en conclut qu’elle ferait bien d’ajouter un flacon de vin blanc de Bourgogne à la collation préparée, et posa sur la table un second pot de confitures. Puis, choisissant dans le clavier suspendu à sa ceinture la clef qui ouvrait le caveau des vins fins, elle alluma une petite lanterne, et, suivie d’ Aldegonde, descendit dans une de cescaves vastes et profondes qui s’étendent sous la cité cambrésienne et pourraient servir d’asile, en cas de besoin, à une population considérable.’

Tandis que la bonne dame s’éloignait, Simon Breton s’approcha du feu pour sécher ses chaussures humides de la rosée du soir, et, n’ayant rien de mieux à faire, regarda la table dressée avec soin, et bien éclairée. La nappe était plissée, parsemée de feuilles de laurier : les assiettes en faïence bleue de Tournai et lespots d’étain reluisaient sous la lampe à trois becs suspendue à la maîtresse poutre. Une salade bien verte mêlée de betteraves, des pommes rouges et des poires environnées de mousse, des noix etdes confitures sèches et liquides, seuls mets que permît le saint temps de carême, étaient rangées avec une symétrie parfaite autour d’une grande soupière où des rôties saupoudrées de sucre attendaient le vin qui devait les arroser, et ce vin, chauffé avec des épices, répandait dans la maison de capiteux arômes…

Souvenirs dune enfance à Saint Hilaire-lez-Cambrai vers 1900

Extrait d’un roman inédit de Fernand Leprette

Gérard Leducq

La biographie de Fernand Leprette, écrivain originaire de Saint-Hilaire-lez-Cambrai, a fait l’objet d’un article dans le n° 113 de Jadis en Cambrésis. Dans son roman inache­vé L’Homme de Kéna, le personnage principal est largement autobiographique. L’évocation de son enfance offre ainsi un témoignage sur Saint-Hilaire vers 1900.

Saint-Hilaire n’est pas nommé, mais les indices concordent nombreux avec la biographie de l’auteur et avec la réalité ancienne du village. Certes quelques éléments sont un peu modifiés, par exemple l’entourage familial : dans le roman, l’enfant est élevé par ses grands-parents, sa grand-mère se prénomme Philonille, il regarde son grand-père tisser dans sa cave ; or dans la réalité, Fernand Leprette a été élevé par ses parents, c’est sa mère qui s’appelle Phi­lonille et c’est son père qu’il a observé au métier. Sa rue de la Nation est rebaptisée rue des Mulquiniers. Mais pour l’essentiel c’est un document fidèle sur le passé du village.

Fernand Leprette n’a pas achevé l’Homme de Kéna; le texte qu’il a laissé est surchargé de modifications. Aussi ne peut-on donner que les grandes lignes de ce qu’aurait été le roman. Le personnage principal, François Lasselin, natif du Cambrésis, part avec sa femme en Égypte, plein d’ambitions généreuses. Victime de trahisons et de sanctions professionnelles, malheureux dans sa vie privée, il connaît une grave déchéance…

Sobriquets et Surnoms de Solesmes

Michel Leduc

Suite à l’article du 31 octobre 2016 paru dans la Voix du Nord, Michel Leduc nous a confié son recueil de sobriquets de Solesmes. Pour des raisons de confidentialité, nous n’indiquons pas à quelles familles ils correspondaient. Notons que les familles d’un certain rang n’avaient pas de sobriquets, ceux-ci étaient plutôt attribués aux classes peu aisées.

Sobriquet : Surnom familier que l’on donne à une personne avec une intention moqueuse ou plaisante, faisant référence à des particularités physiques ou à des traits de caractère de cette personne, à son origine sociale ou géographique, à son métier, à une anecdote de sa vie ou encore formé sur un jeu de mots…